Joëlle Pétillot – A Saint Quay Portrieux

Sous le marais du ciel gémit la blessure des vents. Un lac d’or surgit de son intermittence. Le secret des courants, le tremblement des îles bavardes, la pavane du faux silence sous la roche, rien n’échappe à celui qui croche l’impernanence ; il sait le nuage barbaresque qui couche la lumière comme une femme forcée. Mais prenons garde : ce soleil mouillé est arme d’amazone. À la poigne du norois, à son droit de cuissage assumé, elle résiste par l’éparpillement. On n’emprisonne ni sel, ni vague, ni azur. La traverse d’un rayon clignote sur les sillons salés, et un rire enfantin, muet, mais visible, cascade les plis de l’eau. Cette lumière parenthèse hameçonne, puis mord. Cela saigne un peu, parce qu’elle s’échappe. Parce que la vie rend l’inachevé insupportable à l’humain passant.
Mais voilà : l’éphémère est gage de plaisir, d’attente, d’absolu. D’où naîtrait la splendeur, dans la vase du figé ? Un pas de deux, de trois, de mille entre les os, la peau, et le temps saltimbanque palpite d’une conscience urticante de la brièveté, plus coupante encore quand il s’agit de la beauté des choses.
Il est en nous nombre de douleurs tues, de chagrins plus ou moins enterrés. Elles pèsent lourd, ces pierres absentes, dans le petit cimetière intérieur. Mais qu’un nuage sombre se pousse un peu sur son banc d’école, que la lumière vienne se reposer là pour faire la jolie, que l’eau la reflète avec une avidité d’amante, et voici la grâce, celle qui remplit, déborde le regard, et va s’installer pour jamais dans la tête, le cœur, l’âme, le corps. Peu importe, alors, que ce soit l’or d’une future absence qui tapisse les paupières.

Peinture : Loÿs Pétillot A Saint Quay Portrieux.


Laisser un commentaire