LE CINÉMA DE PHILIPPE GUILLAUME : L’OUEST..LE VRAI !??

Certains historiens du cinéma abordent les genres dans une perspective linéaire bornée par de grandes étapes qui refléteraient une avancée et un progrès. Il aura fallu attendre  » La flèche brisée « (1950) par exemple pour enfin voir des Indiens ne ressemblant pas à des sauvages sanguinaires et ce serait dans les années soixante que nous aurions vu apparaître les anti-héros.       

 En fait, la mise à disposition des films via le DVD bouleverse depuis longtemps les données. J’y repensais en revoyant  » La cible humaine  » d’Henry King ( 1950 ). Ici, pas de romantisme crépusculaire à la Peckinpah, ni d’amertume devant un  » wild west « condamné dont le gunfighter Johnny Ringo verrait finalement d’un bon œil la disparition.

L’ex-terreur de Dodge City qui fit trembler Wyatt Earp aspire à devenir un citoyen bien ordinaire, bon mari et bon père de famille comme on dit ! Quelle déception pour nous, pareils à ces gamins fascinés, séchant l’école pour entrevoir ce pistolero qu’il rêvait de devenir afin d’en imposer aux gros durs des cours de récré. Deux ans avant  » Le train sifflera trois fois « le film obéit à la règle des trois unités de la tragédie classique et Grégory Peck moustachu, comme le regrettait Andre de Toth, ressemble plus à un gentil professeur qu’à un  » gunfighter « .

En cela il préfigure et annonce les deux westerns que Monte Hellman réalisera dix-sept ans plus tard. Dans  » The Shooting « ,des chercheurs d’or tombent sur une jolie drôlesse qui les payent pour la conduire dans le désert à la poursuite d’un mystérieux bonhomme.

On ne sait trop d’ailleurs s’ils sont poursuivants ou poursuivis car le désert n’est pas loin de celui des tartares et on y attend Godot, sûrs que  » si un serpent est plus beau qu’un arc-en-ciel, il n’en mord pas moins « . Si les protagonistes restent complètement à l’ouest, ce n’est pas tout à fait le cas de Raoul Walsh. 

 » L’ouragan de la vengeance  » est de la même veine. Rien ne manque : poursuite, attaque de diligence, amitié virile, famille de fermiers simple et rustique. Un Jack Nicholson débutant y est flanqué d’un habitué du genre : Cameron Mitchell.

Oui, nous avons déjà vu cette ferme perdue dans l’ouest mais on mesure ici l’inconfort de la bâtisse, l’aspect peu ragoûtant du ragoût, la fatigue des protagonistes. Si la présence d’une fille réveillent les cowboys la romance n’est pas du voyage et l’ouragan du titre n’arrive jamais. Aucune montée paroxystique, le simple enchaînement de la violence dont la stupidité est mise en valeur par le dépouillement de l’action.

Les aficionados et moi le premier auraient jadis fait triste mine et drôle de gueule devant cette dévitalisation du genre mais aujourd’hui ce  » jansénisme épique « (1) est finalement sympathique.

 (1)L’expression est de Jean Louis Bory

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